Lorsque l’on nous avait suggéré de visiter le piton de Kastkhi (un monastère perché sur un étroit piton rocheux à 45m du sol), le nom de Chiatura avait également été évoqué. «C’est une très vieille ville minière, partiellement abandonnée, située tout en bas d’un vallon… Il y a environ 17 lignes de télécabines dans la ville pour vous emmener sur les hauteurs, prenez-les; vous aurez une vue sympathique sur la ville et les montagnes!» On a très vite réalisé, une fois sur place, que les belvédères (effectivement sympathiques) ne seraient rien si il n’y avait pas eu quelque chose d’encore plus sympathique: la montée à bord de télécabines rouillées!
Monter ou ne pas monter?
On a d’abord cru à une blague lorsque nous avons aperçu des télécabines fonctionner, tant tout paraissait sur le point de s’écrouler! Imagine un peu le décor: des lignes de télécabines construites dans les années 50, à l’apogée de l’ère soviétique, et complètement intouchées depuis… À l’heure actuelle, il ne reste donc plus que des stations aux murs et plafonds effrités, des poteaux métalliques tordus et rouillés, des cordes et des poulies usées; sans parler des fameuses cabines – sorte de « boîtes de conserve » géantes entièrement ravagées par la rouille, dont les vitres jaunies semblent sur le point d’éclater! Pourtant, il y avait du monde à la station principale près de la rivière Kvirila – des locaux qui n’ont pas hésité une seule seconde à embarquer à bord d’une « télécabine de la mort » lorsque celle-ci est arrivée… Une poussée d’adrénaline s’est alors emparée de nous: après tout, si eux prennent le risque de monter dedans, pourquoi pas nous?
C’est ainsi que, la boule au ventre, nous sommes montés à bord de cette cabine rouillée, pour une ascension d’environ 200 mètres qui ferait passer le plus sensationnel parc d’attraction moderne pour un jeu d’enfant à côté! Le malaise ne nous a pas quittés lorsque nous avons constaté des trous dans le sol, œuvre incontestée de la rouille au bout de 60 années de service: rassure-nous, le sol tiendra bien au-dessus du vide et de la rivière, n’est-ce pas? Nous n’aurons pas le temps d’envisager de faire demi-tour que l’opératrice referme déjà, d’un coup sec, les portes à l’aide de sa vieille clé en tube. On la regarde, fascinés, décrocher le vieux téléphone à cadran et bredouiller quelques mots, avant de s’assoir, face à nous, l’air grave… Un signal sonore strident retentit dans la station, la cabine se met en branle: ça y est, nous décollons!
Une expérience inoubliable
Malgré l’usure certaine, notre cabine monte sans encombre. À mi-chemin, un fort ralentissement intervient, laissant notre cabine tanguer dangereusement: nous nous apprêtons à croiser l’autre cabine, celle partie en descente… On retient notre souffle, mais finalement tout se passe bien et nous finirons par poser pied sur le sol de la station haute, 5 interminables minutes après notre départ, secoués mais vivants! Nous poursuivrons notre immersion dans le passé soviétique en visitant les abords de la station, dans un quartier d’immeubles de béton quasiment abandonné – hormis la présence de quelques familles et d’animaux de basse-cour. Notre tour fini, il a bien fallu se résoudre à regagner le centre-ville de Chiatura… en télécabine. Cette fois-ci, nous montons à bord plus sereins, osant même se placer debout près de la fenêtre! Après cette folle journée, nous sommes sûrs d’une chose: les télécabines rouillées de Chiatura resteront longtemps dans nos mémoires. Oui, mais combien de temps encore en service?
En savoir plus sur la Géorgie
* Article rédigé d’après notre expérience personnelle *
Bonjour, ravie de lire votre article. Nous sommes passés dans cette ville pendant notre voyage en Georgie. N’avons pas tenté les télécabines mais l’atmosphère de cette ville me revient en lisant votre article! Nathalie
Bonjour Nathalie,
Ravis d’avoir pu partager cet instant hors du temps avec toi! On espère que ton séjour en Géorgie s’est bien passé; en tous cas on en garde encore un très bon souvenir (et surtout un très bon souvenir de sa gastronomie!)